Nouvelle noire
Dixième partie : 18 octobre 2015
Les cigales et la fourmi
L’aube a pointé le
bout de son nez depuis longtemps, six heures du matin en plein mois de juillet
c’est normal.
Ce qui l’est moins
en revanche, c’est cette silhouette agitée, sur le balcon d’en face, au
cinquième et dernier étage, cette musique furieuse, à fond les ballons, qui
réveille tout le voisinage, ces cris poussés par l’ombre folle à lier, son
escalade du parapet, ses allers-retours, bras tendus, d’un bout à l’autre du
balcon en équilibre instable, ces cris encore, juste avant la chute, ces cris
sauvages, puis un choc sourd sur la pelouse, en bas de l’immeuble.
« Soirée
déchirée » à la Cigale Musclée, ce vendredi. Pour fêter le début des
vacances, la fermeture de la salle jusqu’en septembre, du moins pour sa partie
« cigale ». Car la partie « musclée » reste ouverte
tout l’été. Pas question de ne pas s’entraîner !
« Soirée
déchirée » : tout un concept ! Le dress code : arriver
déchiré(e). Dans tous les sens du terme. Vêtements déchirés, mine déchirée,
état déchiré, qui ne fera qu’empirer au cours de la fête.
On se la met grave,
alcools forts et pétards, ce soir tout est permis, peut-être même quelques
lignes sniffées dans les toilettes, va savoir, musique rock tonitruante, filles
maquillées, habillées délire pour l’occasion, gaies, souriantes, fumant des cigarettes,
prenant la pose, garçons punk, reggae, classique, rock, hardcore, cheveux
longs, cheveux courts, jeans élimés, tee-shirts abîmés, chemises débraillées,
parlant fort, verre à la main, jeunes du quartier venus faire un tour, on les
laisse entrer bien qu’il s’agisse d’une soirée « privée » ou annoncée
comme telle…
Tout le monde est
là, ça fait plaisir à voir. Myriam, Sheila, Magali, Brigitte, Dédel, Asùn,
Pascale, Malika, Yasmine, Corinne, Odile, Christèle, Sophie, Barbara, Laetitia,
au moins deux Nathalie, la grande Claude, la copine sulfureuse de Vincent qui
se fait appeler Isabelle, Rachid, Khalid, Dom, Fred, Bidi, Fafa, Philippe, les
deux Manu, Mao, Paulo, Jano, Charlie, Mamar et sa moitié, Étienne, Didier, Toutoune, Gérald,
Fabrice, Thierry, Frédéric, Karim, au moins trois Vincent et deux Laurent, Antonio,
José, Fathi, Mohamed, Mustapha, Kader, Hicham, Fayçal, Fabien, Olivier et sa
gentille amie blonde…
Il y a même quelques
culturistes échappés de leur salle de muscu, venus boire un verre de Champagne,
trinquer à leur santé et à celle de tous ces joyeux lurons, même s’il y en a
qui feraient bien d’arrêter de fumer et de se droguer… La petite salle de
concert de la Cigale Musclée est pleine à craquer ! Ce soir, il n’y a pas
de groupes sur scène, le matériel est rangé, l’inventaire a été fait, on n’y
touche plus avant l’automne !
Alors, la musique
crache des baffles de la sono, derrière le bar. CD ou vieilles cassettes de
compils, il y aura de quoi écouter tout au long de la soirée ! Danser,
même ; remuer, sauter en l’air, s’énerver sur un pogo, se jeter dans un
slam, sur des titres imparables comme « Where is my mind ? » des
Pixies, « Smells like teen spirit » de Nirvana, « Tostaky »
de Noir Désir, « Should I stay or should I go » des Clash,
« Mala vida » de la Mano Negra…, et quantité d’autres tout aussi
remuants : FFF, Thugs, Shériff, Nihil, Bérus, Cadavres, Specimen, Parabellum,
Burning Heads, Ard’hons, PKRK, OTH, Zebda, Molodoï, Lofofora, Marcel et son
Orchestre…, un peu de Bob Marley car les filles en demandent.
Elles commencent à
être bien raides, d’ailleurs, les filles. Ce n’est pas être misogyne d’affirmer
que les femmes tiennent moins l’alcool et autres substances en tout genre que
les hommes, car c’est simplement la vérité !
Elles s’écroulent
sur une chaise, à moitié comateuses, la clope au bout de leurs doigts en train
de se consumer quand elle n’est pas déjà tombée par terre (la clope, pas la
fille, quoique…), elles vont vomir dans les toilettes ou bien dehors, si les
toilettes sont occupées, le long des murs en béton de la Cigale Musclée
lorsqu’elles en ont le temps, sinon elles gerbent littéralement, sur le goudron
du parking.
Elles se mettent à
être chiantes, à devenir vulgaires, décadentes, le maquillage ayant coulé, la
coiffure défaite, l’ire et la jalousie comme cheval de bataille, la méchanceté
gratuite, la provocation infâme et calomnieuse entraînant des haussements de
voix entre plusieurs mecs, que les autres se chargent de calmer vite fait avant
que n’éclate une bagarre. On est venu pour s’amuser, c’est rien, c’est l’alcool
qui met les nerfs à vif, c’est juste une prise de tête à cause d’une nana
bourrée, allez tiens, prends une taffe…
Les couples se
reforment ou se forment selon, certains s’enlacent et s’embrassent sous les
néons rallumés au plafond, cela annonce la fin prochaine de cette « Soirée
déchirée » réussie au-delà des espérances, le rangement avec ceux et
celles qui resteront, le ménage à fond, les seaux d’eau, les raclettes, le
ramassage à l’extérieur des verres et autres canettes.
Certains sortent
prendre l’air justement, les solitaires dansent ensemble sous les néons presque
verts à cette heure, d’autres trouvent encore de l’énergie pour se remémorer le
Festival Rock du week-end précédent, accoudés au bar, allez, encore une coupe, et
un pétard roulé, pour la route !
Cinq heures du
matin : José ouvre une dernière bouteille, avec les courageux(ses) qui
sont resté(e)s pour tout « cleaner ». On lève son blida, on trinque, on
se félicite les un(e)s les autres pour le succès de la saison écoulée, riche en
rythmes, en guitares, en couleurs ethniques, que ce soit côté jazz (Christian
Vander Trio, Didier Lockwood Quartet, Faton Cahen), côté blues (Tao Ravao, Paris
Slim, Patrick Verbeke Quintet), côté racines (Kemang Kanouté, Foundada,
Nouraï), côté local (les incontournables Nihil, les J’m’en fous, les Pom Pom,
les tous jeunes Dakodak).
On se remémore les
bons moments dans « la salle d’animation » ouverte dès dix-huit
heures en semaine, à boire un thé, un chocolat, une limonade, un jus de fruit, à
faire un baby, à jouer aux cartes, à parler zique, à en écouter, à discuter des
projets de l’association, des concerts à venir, qui sera là et à quel poste, à
faire l’ordre du jour de la prochaine réunion du bureau ou du nouveau CA, à
lancer les convocations « officielles » par courrier, même si l’on se
voit souvent ici, les un(e)s les autres, à un moment donné…
La partie
administrative ne se trouve pas précisément au bâtiment « Cigale
Musclée », mais un peu plus haut dans la ZUP, sur la dalle, dans les
locaux du Club de Prévention. Et l’on y passe, aussi, souvent. Surtout
lorsqu’on est membre actif au sein du bureau. Alors on vient aider José et
Myriam à rédiger des courriers, à écrire les adresses et à affranchir les
lettres en partance, à plier et à glisser le courrier, à refermer l’enveloppe…
Oh ! Mais ne
serait-ce pas l’heure de se coucher ? Il fait jour, dehors, allez, tout le
monde au pieu ! La viande dans le torchon, comme on dit en Champagne,
hein, chers bénévoles ! Je pars tout à l’heure dans le Tarn, Régine
conduira, cela fait un petit bout de temps qu’elle est allée dormir. Il faut
bien qu’il y ait quelqu’un de responsable, dans la maisonnée ! A tchao,
bon été à tous ! J’enclenche l’alarme, je ferme à double tour… Ça y est,
José est en vacances !
Quelques voitures
démarrent, certain(e)s rentrent à pied, ils ou elles n’habitent pas très loin,
square Mozart, square Lully, square Chopin, square Bizet, square Offenbach, square
Liszt (toujours difficile à écrire du premier coup sans faute), square Léo Delibes,
rue Charles Gounod, allée Édouard Lalo : au number four, la Cigale
Musclée. C’est ici que l’on se quitte, en se disant à bientôt, après la monstrueuse
« Soirée déchirée ».
Il y en a un pourtant
que l’on ne reverra jamais, ou alors en piteux état, dans son cercueil, avant
son inhumation dans le caveau familial, en bonne place dans le cimetière, dans
sa partie ancienne. Une vieille famille bourgeoise, ayant œuvré pour le
rayonnement du vin de Champagne à travers le monde, son industrialisation, sa
mécanisation, ses lignes de chemin de fer à la grande époque, ses chaînes de
dégorgement, de bouchonnage, d’encapsulage, d’étiquetage, d’emballage, d’expédition,
ses robots à remuer les bouteilles, par palettes entières…
Qui était présent au
moment de la fermeture des portes blindées par le responsable, qui est resté
pour le ménage et pour le coup à boire ? Quand l’avez-vous vu ou aperçu
pour la dernière fois ? Quelqu’un l’a-t-il accompagné sur le chemin, l’a-t-il
laissé en bas de son immeuble, l’a-t-il aidé pour prendre l’ascenseur ?
Ou bien l’ascenseur
était encore en panne, alors qui est monté avec lui, pour l’aider à gravir les
marches, à mettre sa clé dans la serrure, qui s’est finalement introduit chez
lui ? Cela fait de l’un d’entre vous un témoin, voire un suspect ; si
c’est le cas il ne vous reste plus qu’à me donner le mobile, ça ira plus vite, car il
y en a un, n’est-ce pas ? L’on ne tue pas sans raison l’un de ses
meilleurs potes en le faisant basculer, comme ça, après une nuit de beuverie,
de son cinquième étage !
Ce n’était pas l’un
de vos meilleurs potes ? Une connaissance, plutôt ? Mais il était à
la soirée ! Vous l’avez vu, tout de même ! Dans quel état psychologique
était-il ? Joyeux ? Hargneux ? Dépressif ? Il avait
beaucoup bu ? Il a consommé autre chose, à part la fumette ? Il ne
buvait plus ? Il ne fumait plus, ni clope ni pétard ? Il ne touchait plus
ni à une allumette ni à un briquet (et pour cause), il cuisinait exclusivement
sur des plaques électriques ? Vous le connaissiez quand même un peu,
alors ?
Des gens très
lucides, vous savez, peuvent en arriver quelquefois à l’idée du suicide et à son
exécution (oui, je suis drôle) dans la minute, cela dit je ne suis pas certaine
encore qu’il s’agisse d’un suicide. On l’a peut-être aidé à monter sur la
balustrade, on l’a peut-être encouragé à s’y trémousser jusqu’à tomber dans le
vide « par accident », on l’a peut-être poussé et dans ce cas c’est
un meurtre, oh, il ne fallait pas grand-chose pour le déstabiliser, après cette
« chouille » du tonnerre, n’est-ce pas ?
Il y avait cette
musique de cinglés, aussi, dans le lecteur CD. Quelqu’un peut-il me dire si l’album
« Suicide assisté » de ce charmant orchestre nommé Les Phacochères était vraiment indiqué lorsque
l’on a des idées suicidaires ? Vous n’étiez pas au courant, pour ses idées
suicidaires ? Qui a fait jouer ce disque sur la platine, qui a mis le
volume au maximum, la meilleure façon de se faire repérer par l’entourage, cela
dit ?
Apparemment, il a
des antécédents, sa sœur me l’a confié, ce matin. Vous le savez sans doute, si
vous le connaissez un peu : il a foutu le feu chez lui il y a de cela
quelques années à cause d’une cigarette mal éteinte, il s’est endormi, coma
éthylique, son appartement s’est embrasé, il s’en est sorti avec de graves
brûlures, notamment au visage. Pas facile de revivre, hein, après ça ? Surtout
lorsqu’on a coupé les ponts avec sa riche famille ? Depuis ce drame, il ne
sortait plus qu’exceptionnellement, pas vrai ?
Et hier soir, il
était invité à la « Soirée déchirée » ? Il est venu tout
seul ? Non, vous êtes venu le chercher car sinon il n’aurait pas décollé,
d’accord. En quel honneur était-il invité ? C’était une soirée privée, sur
invitations nominatives, ils font ça bien, les rockeurs d’aujourd’hui. Ah bon,
parce qu’il avait réalisé les illustrations de la Semaine Jazz, en mars, et celles
du Festival Rock, début juillet ?
L’équipe de la
Cigale Musclée voulait le rencontrer afin de le remercier, l’encourager, envisager
avec lui d’autres projets graphiques… Si vous n’étiez pas passé le chercher, il
serait resté tout seul chez lui, alors, comme d’hab. Personne ne le connaissait
vraiment bien, alors ? Qui l’avait déjà vu, avant hier soir ?
Ah, vous… Veuillez
parler, s’il vous plaît. Ainsi vous étiez sa petite amie dans les années
quatre-vingt, vous alliez tous les deux au lycée à l’époque, vous avez souvent
dormi ensemble mais sans jamais coucher, OK. Rien de plus frais, de plus
actuel ?
Vous ne l’avez revu
que ce soir, vous avez parlé un peu du bon vieux temps, sans plus ? Vous
étiez accompagnée de votre ami du moment et vous êtes allée le rejoindre parce
qu’il commençait à coller de trop près une grande brune horriblement fardée,
vêtue d’un vieux drap sale laissant voir un sein ? Je vous comprends, bien
sûr. Solidarité entre femmes oblige !
Et vous… Oui vous, crachez
le morceau, maintenant ! C’est vous qui l’avez raccompagné, au petit matin,
après la fête. Jusqu’où exactement ? Vous étiez trop raide, vous ne vous
souvenez pas. Vous vous souvenez l’avoir raccompagné, oui ou non ? Vous
l’avez quitté sur le chemin, en bas de son immeuble, au pied de l’ascenseur ou
au pied des marches, plus haut dans les étages, jusqu’à sa porte, vous êtes
entré avec lui à l’intérieur de son appartement ? C’est bien, mon jeune
ami, continuez, je vous prie !
Est-ce vous qui avez
mis « Suicide assisté » de ces affreux Phacochères en rut,
n’avez-vous fait qu’allumer la chaîne et appuyer sur « Play »
machinalement, sans savoir s’il y avait ou non un disque ? Vous vouliez en
mettre un autre, de disque, après toute cette folle nuit à écouter du bruit, ça
vous manquait, bien sûr… D’accord, c’était déjà dans le lecteur, c’est même lui
qui vous a demandé de mettre la chaîne en marche, afin de danser sur son album
du moment. On avance, on avance !
Alors pourquoi
n’avez-vous rien fait quand vous l’avez vu ouvrir la fenêtre du balcon,
gesticuler et hurler comme un possédé, grimper sur la rambarde et s’y balader ?
Vous vous en êtes douté, quand même, à ce moment-là, qu’il voulait se foutre en
l’air ? Vous veniez de prendre de l’héro, vous étiez scotché, comme dans
un film, vous aviez l’impression d’assister à un spectacle donné spécialement
pour vous par votre compagnon d’infortune… Bravo ! Non-assistance à
personne en danger, ça vaut dans les combiens à votre avis ?
Pourquoi n’êtes-vous
pas resté dans l’appartement quand le corps est tombé, pourquoi n’avez-vous pas
au moins appelé la police avant de vous enfuir, vous étiez aux premières loges,
non ? Je sais, des voisins l’ont fait à votre place. Vous auriez pu
attendre la police, dire que vous aviez été témoin du drame, expliquer ce qu’il
s’était passé, honnêtement, calmement ?
Ah, vous n’êtes pas
quelqu’un d’honnête et encore moins quelqu’un de calme, vous avez déjà fait de
la prison. Ce matin, dans votre veste, il y avait une bonne quantité de doses
d’héro et de coke, pour la revente, dès le début de l’après-midi. Montrez-moi
ce que vous avez, là, dans vos poches ? Évidemment, vous avez pris soin de
tout planquer avant votre convocation au commissariat, je vous félicite, quel
professionnalisme !
Votre ami, là, le
macchabée, il a laissé une lettre de plusieurs pages, glissée entre son ventre
et sa chemise, une pièce à conviction qui plaidera certainement en votre faveur,
mon cher ! Il l’a écrit dans un délire, sans aucun doute, mais il y dit
qu’un jour, quand le moment sera venu, il se jettera de son cinquième étage, et
comme tout seul il n’a « pas les couilles », il mettra son plan en
pratique quand il aura trouvé des spectateurs.
« Suicide
assisté » c’est son credo personnel, c’est ainsi qu’il veut mettre sa mort
en scène, devant, si possible, un public friand de ce genre de performance.
L’œuvre d’art sublimée par cet acte irréversible, le trépas comme apothéose, la
plus belle fin qui soit, faire un dernier tour de piste, etc, sortir sur le
balcon, danser, crier, enjamber la rambarde, etc, basculer, sentir son corps voler,
s’écraser, s’exploser dans l’herbe grasse, son âme monter au ciel pour
retrouver J. R. R. Tolkien, Philip K. Dick, H. P. Lovecraft et autres larrons…
Bon, on va s’arrêter
là pour la séance de lecture et l’interrogatoire, je vous remercie tous, vous
m’avez bien aidée. Le temps d’éclairer encore quelques points de l’enquête, et ce
sera vite bouclé, heureusement. Ou plutôt, malheureusement. Malheureusement
pour lui, pauvre type ! Dans sa boîte aux lettres, ce matin, il y avait un
pli des Éditions Dargaud lui proposant un contrat, un rendez-vous à fixer en rappelant
le secrétariat, le plus tôt possible. Quelle ironie du sort, quel destin
tragique, vous ne trouvez pas ?
Il aimait faire des crobars,
des petits Mickeys, de la Bande Dessinée ? Il avait du talent, vous me
l’affirmez ? Il n’attendait peut-être que ça, pour revivre, d’avoir un
contrat ? Il n’a pas choisi le bon, en l’occurrence. À une journée près,
son parcours aurait pu changer du tout ou tout ! Le voilà qui a mis un
terme à sa vie avec pour seul spectateur un ivrogne et camé de première, un mec
traînant dans les affaires louches, voitures volées, trafic de drogue, ancien
taulard… En tant qu’artiste, il méritait mieux, non, vous ne croyez pas ?
Ah, quand vous êtes
descendu avec lui pour l’emmener à la soirée, il a voulu regarder dans sa boîte
aux lettres, il attendait un courrier important mais vous lui avez dit qu’on
n’avait pas le temps, que ça pouvait attendre demain, qu’on était déjà en
retard. Oui, effectivement. Si vous deviez avoir quelque chose à vous reprocher,
ce serait le fait de ne pas l’avoir laissé ouvrir sa boîte aux lettres hier
soir, celle des Éditions Dargaud s’y trouvait peut-être déjà…
Descendre plus
profond dans les abysses : Alex, convoquez le facteur qui fait sa tournée
par le square Offenbach, qu’il vienne le plus rapidement possible, avant que sa
mémoire flanche. À cette heure-ci, il doit avoir fini son travail, il doit être
chez lui. Ramenez-le moi toute affaire cessante, son témoignage peut être
capital (enfin, pour ma morale personnelle, pas pour l’enquête, qui, à n’en pas
douter, conclura à un suicide, tordu, certes, mais un suicide).
Mesdames et messieurs,
je vous remercie encore une fois pour votre aide précieuse. Cette personne s’est
sûrement suicidée comme tant d’autres dans cette ville, dix le mois dernier, déjà
trois depuis début juillet, selon des modes opératoires qui prêteraient à rire
si ce n’était pas dramatique de se donner la mort, pour un homme, comme pour une
femme. Le pire, c’est quand ils se tuent après avoir zigouillé toute leur
famille… Brrr… Pathétique.
Bref. Vous restez,
bien entendu, à la disposition de la police. Oui, vous ne risquez pas de vous
promener par monts et par vaux après cette nuit blanche éprouvante, vous avez
du sommeil à rattraper. Alors bonne nuit, les enfants ! Faites de beaux
rêves ! Veuillez me suivre… Par ici la sortie.
La Cigale Musclée (1989/1996) :
il est temps d’en parler (plus ou moins) sérieusement.
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