L’album de Charlélie Couture, "Pochette
surprise", est sorti en 1981, la même année que "Poèmes rock" et
son tube imparable "Comme un avion sans aile", tous deux sur le
prestigieux label américain Island Records (Jimmy Cliff, Skatalites, Bob
Marley, Steel Pulse, Black Uhuru, U2, Roxy Music, Grace Jones, Bob Dylan, Tom
Waits, Annie Lennox, PJ Harvey, Weezer, Jamie Cullum, Stromae…, pour n’en citer
que quelques-uns). L’artiste, originaire de Nancy, fut d’ailleurs le premier
Français à être signé par Chris
Blackwell, le fondateur du label en 1959.
À l’époque, j’étais loin de savoir tout ça, mais
j’avais des amis qui écoutaient de la musique, toujours à l’affût de bonnes
galettes, partageant leurs trouvailles chez les uns, chez les autres, lors de
réunions festives… Il y en eut pas mal chez moi, de ces fêtes musicales, ou
plutôt chez mon père, dans la grande salle à manger. Je me souviens du plaisir
d’être ensemble, à échanger des idées, des avis, des blagues, des nouvelles,
les disques des uns et des autres se succédant sur la platine.
"Pochette surprise" et "Poèmes rock"
ont été si indissociables pour moi que je ne savais pas si telle ou telle chanson
se trouvait sur l’un ou sur l’autre, tellement je les passais en boucle, à l’orée
de mes vingt ans. C’est sans doute pour cette raison que, bien plus tard, je
les ai compilés ensemble sur un même CD, avec leur pochette respective en recto
verso, les deux formant un tout.
La musique, ça va, ça vient, l’on va écouter un
disque intensément à un moment donné puis l’oublier, peut-être ne jamais le
réécouter. Mais il y en a d’autres, tenaces, qui s’imposent et reviennent nous
hanter, des années après, avec l’envie irrésistible de les jouer à nouveau,
pour savoir s’ils nous donnent toujours autant de plaisir, ou si leur intérêt
s’est émoussé au fil du temps…
Au cours de mes dernières vacances d’été, lorsque
je suis allée à Auvers-sur-Oise puis en Normandie, je m’étais préparé pour la
route une trentaine de CD, actuels ou plus anciens, glanés dans ma collection, au
fil de mon inspiration.
Alors oui, Charlélie Couture ferait partie du
voyage, et je me souviens fort bien du choc émotionnel qu’il a provoqué : "Pochette
surprise" d’abord, "Poèmes rock" ensuite. J’en ai pleuré, tout
en conduisant, tellement cela me touchait d’entendre à nouveau ces textes
chocs, cette voix à l’accent insensé, de découvrir des sens qui m’avaient
échappé, de repenser à mes même pas vingt ans.
"La ballade du mois d’août 75" est sur "Pochette
surprise", elle fait partie des chansons que je connaissais par cœur, que
je chantais à tue-tête, à la moindre occasion. Elle raconte de beaux souvenirs
d’été, de vacances à la campagne, dans le Midi, et cela n’était pas sans m’évoquer
mes propres étés de quand j’étais enfant. Cette chanson exprimait parfaitement
ma nostalgie, mon désespoir face à un passé révolu, ma tristesse à la pensée de
moments de bonheur.
"Mais il ne reste jamais rien de ce qui est
vécu, quelques grains oxydés sur de la paraffine et des souvenirs idiots, mais
qui donnent un peu de lumière, les jours de pluie…"
Après une "partie de jardin" donnée chez
moi fin septembre, me retrouvant seule (et pompette) pour finir de ranger, j’ai
réalisé mes diverses activités de ménage en écoutant à fond mes deux albums
liés de Charlélie, cette fois-ci sans pleurer. J’ai joué et rejoué "La
ballade du mois d’août 75" jusqu’à épuisement, la déclamant avec tout mon
cœur, avec toutes mes tripes.
Cette fois-ci, ce n’était pas seulement les étés de
mon enfance que je regrettais, c’était tous les étés heureux que j’avais passés
jusqu’à présent, et qui ne reviendraient jamais. Mes vingt ans non plus,
d’ailleurs.
Je ne me suis pas laissé abattre pour autant. Ce
fut en quelque sorte un bon défouloir, une sorte d’exorcisme, une transe
expiatoire, que cette écoute forcenée ! Je venais de passer un excellent dimanche,
chaud et ensoleillé, entourée des amis que j’avais invités.
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