dimanche 29 décembre 2013

Journal de bord : épilogue


Jeudi 29 août 2013
C’est la pré-rentrée : retour dans mon école de rattachement pour des réunions de travail, la prise de contact avec le nouveau directeur et les collègues nouvellement nommés. C’est encore l’été, les mines sont bronzées, détendues…

Tout le monde est présent, pas de remplacement pour moi dans l’immédiat, du moins dans cette école. En attendant un éventuel coup de fil de l’Inspection, je laisse mes collègues s’installer dans leur classe et je donne un coup de main au directeur.

Lundi 2 septembre 2013
Demain, c’est la rentrée des élèves. Aujourd’hui, Frédérique, sur le double niveau CM1/CM2, m’annonce qu’elle va devoir s’absenter à partir du jeudi 4 pour raisons médicales, une semaine voire plus. Après mise au courant de l’Inspection, j’apparais toute désignée pour effectuer le remplacement.

Je me renseigne auprès de Frédérique sur la façon dont elle compte travailler en double niveau, sur ce qu’elle fera mardi, sur ce qu’elle avait envisagé de commencer jeudi… Je connais un peu ses méthodes de travail pour l’avoir déjà remplacée en 2012, de la rentrée des vacances de Toussaint jusqu’à celles de Noël.

J’avais passé de bons moments dans sa classe de CM1, plutôt travailleuse et d’un bon niveau, située dans l’école d’un quartier pavillonnaire. Cela avait été, je dois l’avouer, nettement plus enrichissant qu’avec « mon » CM1 de ZEP, de mars à juillet 2013.

Mardi 3 septembre 2013
Dès huit heures vingt, les élèves arrivent tous pimpants ; ce début de matinée est ensoleillé et met du baume au cœur. Je suis dans la cour pour les accueillir, beaucoup de parents sont là aussi, notamment pour les petits qui entrent en CP. Tout le monde sourit, tout le monde paraît content, si seulement ça pouvait durer !

Je reste après seize heures trente pour « faire la liaison » avec Frédérique, je prends connaissance de son emploi du temps hebdomadaire (ici, durant cette année scolaire, nous allons continuer à travailler sur quatre jours), de ce qu’elle a fait aujourd’hui, de ce qu’il y aura à poursuivre les jours à venir… Elle a fait passer des évaluations sur les deux niveaux de classe, elle me promet qu’elle les corrigera dès que possible.

Le livre de français englobe les niveaux CM1 et CM2 (cela va bien simplifier les choses), il y a un manuel de maths pour chaque cours mais c’est le même éditeur et la même collection. Il faudra dédoubler en histoire, mais pas forcément en sciences, ni en géographie. Je vais faire au mieux pour que ça tourne.

Jeudi 4 septembre 2013
Mon mercredi matin a été consacré à la préparation de la classe, j’arrive « armée » et « outillée ». Les huit CM1 et les quatorze CM2 sont surpris de me voir, ils n’ont pas été mis au courant, cela leur fait bizarre de changer de maîtresse du jour au lendemain, qui plus est dès leur deuxième jour de classe. Parmi les CM2, il y a quelques élèves que j’ai eus l’an dernier dans le « fameux » CM1 : les très sérieuses Elif et Beyza, les un peu plus agitées Schaïneze et Macouta, la gentille Assa, ainsi que Souhaïb et Yunus-Emre. Je connais un peu les CM1 et les autres CM2, pour avoir effectué des remplacements dans différentes classes de l’école, les années précédentes.

Dans la matinée, le directeur arrive avec une nouvelle élève nommée Islam, dont je dois évaluer les compétences pour savoir si elle est capable de suivre en CM1 ou en CM2. L’année dernière, elle se trouvait dans une classe pour enfants non francophones (elle arrivait d’Espagne) et réintègre donc un cours « banal » après avoir appris le français. Les effectifs montent à vingt-trois, je trouve que c’est énorme pour un double niveau et qui plus est, en ZEP.

Jeudi 19 septembre 2013
Le congé de ma collègue a été prolongé jusqu’au mardi 24 septembre inclus. Il se peut qu’il se prolonge encore après, donc je m’investis « comme si c’était ma classe ».

J’ai à peu près trouvé un rythme de croisière avec, dès le matin, les mêmes activités :
-La date historique (un événement marquant au cours des siècles, comme la naissance de François 1er le 12 septembre 1494 ou la mort de Maria Callas le 16 septembre 1977…)

-La dictée du jour (quelques phrases simples corrigées tout de suite après au tableau, en justifiant l’orthographe, l’orthographe grammaticale, les règles d’accord…)

-Suivent une leçon de français, des exercices d’application et, après la récréation, des maths avec calcul mental pour tous, puis cours en double niveau dans la mesure du possible.

En début d’après-midi, j’ai repris le principe de la lecture offerte, qui est toujours un moment privilégié en termes de calme et d’écoute.

Après, on fait des sciences, de la géographie, de l’histoire en double niveau puisque les CM1 attaquent le Moyen Âge alors que les CM2 abordent le XVIIe siècle et la monarchie absolue.

Une fois par semaine on va en salle info, au gymnase, on fait un peu d’anglais (grâce aux Beatles).

La deuxième partie de l’après-midi est toujours délicate, les élèves reviennent énervés de la récréation et il est difficile de les remettre au travail. Le vendredi après-midi, après avoir donné les devoirs pour le lundi, je laisse les élèves s’installer comme ils veulent pour jouer ou dessiner.

J’ai emprunté des jeux de société à la nouvelle collègue de CM2, qui occupe la classe que j’avais l’an dernier en CM1. Je mets des coloriages (magiques, mandalas) à disposition, tout le monde est occupé, mais il faut surveiller, rester vigilant. On n’est jamais à l’abri d’un débordement, les violences sont quotidiennes quoi que l’on fasse.

Dans l’ensemble, ça se passe bien. C’est comme une soupape de sécurité, ces jeux du vendredi. Je souffle, eux aussi ; je les sens relativement contents d’être en classe. Il me semble important qu’il y ait aussi, de temps en temps, sur le temps scolaire, ce côté plaisir.

Mardi 24 septembre 2013
C’est peut-être mon dernier jour avec les CM1/CM2, mais je ne le sais pas encore et Frédérique non plus, cela dépendra du résultat de ses analyses, qu’elle aura seulement en fin d’après-midi.

Ce matin, la date historique est au sujet de Georges Brassens (1921-1981) et de son triomphe devant le public de l’Olympia, le 24 septembre 1954.

Suivent la correction de la dictée bilan du lundi, une nouvelle dictée d’entraînement, un jogging d’écriture dont le thème est : « Je raconte mon pire cauchemar. »

Je passe du temps avec certains élèves pour organiser leur classeur en fonction des matières étudiées. Il faut placer correctement les intercalaires, écrire dessus le nom de la matière concernée… J’ai horreur des classeurs, je hais les classeurs, je préfère les grands cahiers dans lesquels on colle les feuilles, ou les porte-vues qui permettent de ranger les documents dans l’ordre, sans risque de tout faire exploser si ça tombe par terre…

En géométrie, nous reproduisons la figure de l’escargot en utilisant la règle et le compas. Je trouve important que les élèves soient à l’aise dans le maniement des instruments avant d’attaquer des notions plus théoriques.

Après la lecture offerte du début d’après-midi (« Une bête dans la nuit » dans « Les contes du stylo magique » de Philippe Barbeau), nous récitons la poésie donnée par Frédérique le premier jour de classe : « La guenon, le singe et la noix » de Jean-Pierre Claris de Florian.

C’est le jour de la photo de classe dans la cour de l’école, puis de la photo des enfants et des enseignants de l’école tout entière. Je barre « Instruction civique » et « Nombres et calculs » sur mon programme de l’après-midi. Nous copions les devoirs pour jeudi avant d’aller en salle informatique faire une recherche sur les Beatles. Un demi-groupe est sur les ordis, l’autre fait un coloriage mathématique (la table de multiplication par 4) puis on change.

Frédérique me téléphone sur mon portable vers dix-sept heures pour m’annoncer qu’elle reprend jeudi 26 septembre. Je suis encore dans la classe, à corriger les cahiers du jour. Comme à chaque fin de remplacement, quelque part je me sens « soulagée » (ça n’a pas toujours été simple), et en même temps j’ai un pincement au cœur à l’idée de quitter les élèves (même si certains sont particulièrement gratinés).

Frédérique vient me retrouver pour « faire la liaison », nous travaillons jusque dix-neuf heures. J’emporte à la maison des exercices sur feuille à corriger pendant mon mercredi, histoire de tout bien « boucler », dans les règles de l’art.

Lundi 4 novembre 2013
En ce jour de rentrée des vacances de Toussaint, il y a deux collègues absentes dans mon école de rattachement. On m’attribue le CM2 (l’autre classe est un CM1), me revoilà dans la salle que j’ai occupée l’année scolaire précédente en CM1, cela me fait tout drôle.

Je retrouve l’autre partie de mes anciens élèves de CM1, certain(e)s avec grand plaisir (Safeer, Osman, Simbara, Moussa, Mohamed-Amine, Koumba, Maïssa), les autres avec un peu plus d’appréhension (Mody, Mehdi et Mamadou, Naïma et Rebecca). Sibel et Sila sont absentes ce jour-là, elles le seront aussi le lendemain. Je me demande bien pourquoi, après deux semaines de vacances !

Je décide de but en blanc de me lancer dans la conjugaison. Sur le cahier de leçons, il n’y a qu’un texte photocopié sur « le verbe et son infinitif » mais en feuilletant le manuel de français avec les élèves, ils me disent qu’ils ont déjà étudié et fait des exercices sur le présent de l’indicatif des verbes du 1er et du 2e groupe, ce qui semble pertinent puisqu’ils ont déjà eu huit semaines de classe depuis la rentrée.

Je redémarre donc sur le présent de l’indicatif des auxiliaires être et avoir, et de quelques verbes du 3e groupe. J’apprendrai plus tard qu’en fait ils n’avaient pas commencé du tout la révision du présent, ils m’ont dit ça au hasard…

Tant pis, ce n’est pas dramatique. Dans l’ensemble, les élèves de cette classe sont studieux, calmes et appliqués ; je constate qu’ils ont mûri, grandi, depuis l’année passée. Il y aura quand même dès le matin une altercation (plus trivialement une bagarre) entre Rebecca et son voisin de table Youssef. La collègue Frédérique occupant la classe voisine intervient et m’aide à les séparer. Je change Rebecca de place et je punis les deux fauteurs de trouble à la prochaine récré.

Mardi  5 novembre 2013
Mon remplacement se poursuit sur une deuxième journée, le temps que la collègue récupère d’une gastro plutôt coriace. Comme la plupart des élèves me connaissent, leur faire la classe me semble relativement facile, en tous les cas plus facile que dans le CM1/CM2 du mois de septembre. En histoire, nous étudions une version simplifiée de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, ce qui débouche sur des débats intéressants.

Comme nous sommes en novembre, nous lisons et répondons aux questions (lecture/compréhension) d’un texte sur le déclenchement de la première guerre mondiale, les tranchées, les Poilus, les batailles meurtrières, l’armistice du 11 novembre 1918…

Les élèves n’auront pas perdu leur temps, moi non plus ; je sors de ces deux jours relativement satisfaite et toujours motivée par l’envie d’enseigner.

 

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