mercredi 4 septembre 2013

Journal de bord : semaine 3


Lundi 10 juin 2013
Que de temps perdu afin d’obtenir le calme, avant de pouvoir commencer une nouvelle activité ! Je répète les mêmes choses à longueur de journée, je pousse au travail des enfants qui n’en ont pas envie… Pour certain(e)s, j’ai envie de laisser tomber, cesser de m’acharner alors qu’ils n’en ont rien à faire. Mais je retourne toujours vers eux/elles, je ne peux pas ne pas faire mon métier.

Je vais voir la directrice avec Mamadou, insupportable en classe, qui passe son temps à me répondre et à me tutoyer à la moindre remarque de ma part. Il a le culot de dire à la directrice que c’est moi qui lui manque de respect ! C’est le monde à l’envers !


Mardi 11 juin 2013
Nous travaillons le matin, je collecte l’argent pour la loterie et pour les cartes de jeux : la kermesse a lieu l’après-midi. Mehdi est encore absent, il arrive à 13 heures 20 en me donnant comme excuse : « Elle ne m’a pas réveillé. » « Elle », c’est sa mère, une femme complètement à la masse qui, quand par bonheur emmène ses trois enfants le matin à l’école (il y a un plus jeune frère en élémentaire, une petite sœur en maternelle, il y a aussi un frère aîné au collège), est le plus souvent en tenue négligée (pyjama, pas coiffée, clope aux lèvres…). Mehdi a un billet de 50 € à la main pour payer la kermesse, je préviens la directrice, elle lui vend deux cartes de jeux à 5 € (une pour lui, une pour son frère) et met l’argent restant dans une enveloppe, qui sera restitué plus tard à ses parents.

Je prends en charge le chamboule-tout avec Assa et Moussa comme « assistants ». Ce sont les deux seuls enfants de la classe qui n’ont pas acheté de carte, ça m’ennuie de leur en donner une gratuitement alors que tous les autres ont payé. Ils me rendent bien service, ramassent les boîtes qui tombent, les replacent sur la table, vont rechercher les balles, les distribuent aux joueurs… Comme ils m’ont bien aidée et que d’autres enfants veulent les remplacer, je leur donne finalement une carte, c’est normal qu’ils s’amusent eux aussi.

La directrice met de l’ambiance avec la musique et son micro sans fil, elle passe de stand en stand et fait des commentaires ; je danse, les enfants sourient, le temps passe vite, c’est un bel après-midi !


Jeudi 13 juin 2013
Je continue mes séances d’EPS dans la cour, certain(e)s sont toujours aussi peu dégourdi(e)s et ne sont pas encore au clair avec les consignes de déplacements : ils/elles confondent pieds joints avec cloche-pied, ils/elles ne savent plus ce que sont des pas chassés… Je parviens à les faire courir six minutes en endurance (et encore, pas tous/toutes) après trois mois d’entraînement hebdomadaire.

L’évaluation départementale de sciences comporte, pour la fiche « mélanges et solutions », une séance de manipulation où il faut dissoudre du sucre dans de l’eau. Chaque élève a, sur sa table, un gobelet en plastique transparent (je les ai achetés avec l’argent de la coopérative) et un sachet de sucre en poudre (fournis par mes soins). Des cuillères en métal (provenant de la cantine) circulent pour « touiller ».

Ce n’est qu’une petite expérience, mais elle provoque l’hilarité générale, surtout quand, pour vérifier que le sucre s’est bien dissous dans l’eau, qu’il n’a pas « disparu » comme certain(e)s le pensent, les enfants boivent l’eau du gobelet et constatent qu’elle a un goût sucré. J’anticipe les débordements, je maîtrise les agitations, nous passons aux questions du livret, nous y répondons ensemble.


Vendredi 14 juin 2013
Le matin, comme prévu, nous retournons à la bibliothèque pour visiter l’exposition consacrée à l’opéra et trouver les réponses au quizz. Les enfants sont intéressés, cherchent les informations, me sollicitent pour que je les aide. Je repars satisfaite, en remerciant les deux bibliothécaires pour leur initiative et leur disponibilité.

Le début d’après-midi est très houleux ; comme je ne peux commencer la géométrie dans le bruit et que « la musique adoucit les mœurs », je leur passe le grand air de « La Norma » avec la cantatrice Montserrat Caballe. Cela leur plaît beaucoup, ils se reposent, ils se calment.

C’est tout de même fatigant de lire et de comprendre une fiche de construction géométrique, surtout quand il n’y a plus de modèle à disposition… Il y a ceux et celles qui font des efforts, qui se lancent quand même, qui réussissent ; je les encourage et je les félicite ; il y a ceux et celles qui attendent que « je leur mâche le travail » en leur montrant le modèle, sur ma fiche de préparation ou au tableau ; il y a ceux et celles qui sont toujours malhabiles avec le compas, qu’il faut aider, suivre pas à pas…

En fin de journée, je réalise devant les élèves intéressés l’expérience consistant à « récupérer » du sucre dissous dans l’eau, en faisant chauffer le tout dans une casserole sur un petit gaz de camping (apportés par mes soins). Je fais attention à ce que le sucre ne se transforme pas en caramel, les enfants goûtent ce qui reste au fond après l’évaporation de l’eau, constatent que c’est sucré, que le sucre est bien là… C’était important pour moi de le faire, d’aller au bout des choses.


Avant de quitter la classe, Mamadou, qui s’est fait remonter les bretelles par ses parents suite à son passage, lundi, dans le bureau de la directrice, me demande : « Ça a été, aujourd’hui, maîtresse ? » C’est-à-dire son comportement... Je lui réponds que oui, qu’il a fait des efforts, qu’il s’est mieux tenu, qu’il a été plus correct avec moi… J’attends qu’il continue à bien se comporter la semaine prochaine !

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