mardi 31 décembre 2013

Les nouveaux bonheurs

Octobre 2013

Première partie : Kiwi

C’est moi la plus douce, la plus mignonne, la plus câline, ma maîtresse me le dit tous les jours. Et tous les soirs, quand je m’endors avec elle, tandis qu’elle me caresse le ventre. C’est tellement agréable ! Je vais moins dehors la nuit, en ce moment. D’abord, il fait plus froid ou alors il pleut. Ensuite, il y a des chats qui me font peur, qui m’attaquent, qui me griffent, alors je préfère rester chez moi.

Tempo, toujours aussi gros et encore plus méchant qu’avant, aime être dehors, autant le jour que la nuit. Il vient manger aux heures où notre gentille maîtresse remplit nos gamelles puis repart, non sans avoir déposé çà et là des petits jets de pisse. C’est dégoûtant ! Ma maîtresse se met en colère contre lui, elle ne comprend pas pourquoi il fait ça, il est choyé, bien traité, il n’a aucune raison de se comporter ainsi. C’est pénible, à la longue. Quel triste individu !

Il est toujours fourré avec monsieur Patate, ce rouquin énorme, patibulaire, qui ne me fait que des misères, me prenant de haut, grognant, me menaçant. Il me poursuit, il me donne des coups de griffe, il m’entaille les oreilles… Monsieur Patate et Tempo, c’est la fine équipe, spécialisée dans les mauvais coups. De bien vilains personnages !

En ce moment, ça m’est plutôt égal, car je passe mes journées et mes nuits à dormir bien au chaud sur la couverture rouge. Ah ! Que je l’aime, cette couverture rouge ! Si moelleuse, si confortable ! Le matin, ma maîtresse refait le lit, le met en position canapé et plie la couverture avec précaution. Elle m’invite à venir m’y coucher, après que j’ai eu mangé de bonnes croquettes, une bonne pâtée, et bu un peu de lait.

Je ne me fais pas prier ! Je ronronne, je piétine de mes pattes avant, je tète, je m’installe en rond, accompagnée par les encouragements et les caresses de ma maîtresse. Elle s’en va, je m’endors, contente, le ventre plein. Tout va bien.

J’ai six ans, maintenant. Ma maîtresse n’y croyait pas, l’autre jour, quand elle a feuilleté mon carnet de santé. « Et cela fait déjà trois ans que nous avons emménagé ici » a-t-elle ajouté à mon intention, tout en me caressant affectueusement le front. « Tu reviens de loin, toi ! Quelle aurait été ta vie si je ne t’avais pas recueillie ? Tu es la plus belle créature féline de toute la Terre ! »

Au début, quand je suis arrivée ici, j’ai eu un peu de mal à m’y faire. Le jardin est beaucoup moins grand, les voitures roulent à deux pas de la maison, sans parler des camions et des bus… Je ne me sentais pas en sécurité. Dans l’appartement, il n’y avait que des cartons. Des montagnes de cartons, où j’allais me cacher pour échapper à Tempo, toujours prêt à me harceler. Au fil des jours, ma maîtresse a aménagé l’espace, elle a construit des meubles, elle a rangé ses affaires dedans, les cartons ont disparu…

Il y a cette grande et large étagère au milieu de la pièce principale, qui sépare le coin chambre du coin bureau. En bas de l’étagère, elle a laissé un casier vide, très utile comme passage lorsqu’on est un chat, afin d’aller plus rapidement de la chambre vers le couloir, la salle de bains et la litière, la porte d’entrée… Elle pense à tout, ma chère maîtresse ! Elle aime tellement les chats !

 
Deuxième partie : Tempo

Plus les années passent, moins mon caractère s’arrange, ma maîtresse me le dit souvent, trop souvent à mon goût, ça me met en rogne ! Enfin oui, c’est vrai, je suis désagréable, je grogne, je hérisse les poils, je ne veux pas qu’elle me touche et si elle le fait quand même je la griffe et je crache… Malgré tout, elle reste gentille avec moi, elle me nourrit copieusement, elle me ressert, si j’ai encore faim.

Je n’ai jamais manqué de rien, je suis ici comme un coq en pâte, bien portant mais pas obèse, non. D’ailleurs, mon ami monsieur Patate, bien enrobé, corpulent comme moi, affirme ce que je sais déjà : être gros, c’est être beau, et cela donne un certain avantage sur les autres chats de la résidence. C’est lui le chef, il s’est imposé comme tel, avec sa carrure, sa force, sa combativité. Il n’hésite pas à flanquer de bonnes raclées à ceux ou celles qui voudraient se rebeller !

Cette chère Kiwi, si naïve, si craintive, en sait quelque chose ! Il se livre à de véritables courses poursuites avec elle quand il croise son chemin et ça ne se termine jamais bien. Ah ! La jolie petite chose n’est pas bien fière quand elle revient à la maison avec des griffures sur son corps longiligne et ses oreilles délicates…

Moi aussi j’ai subi les pires tortures et humiliations de la part de monsieur Patate. Au début de son arrivée ici, tout du moins. Car maintenant, je suis son plus fidèle serviteur et son meilleur ami. Je le respecte, je suis soumis, il le sait et j’en prends mon parti. Il me laisse à peu près tranquille et j’ai le privilège de l’accompagner dans ses virées nocturnes. Nous livrons de sacrés combats, tous les deux ! Nous leur en faisons voir, à ces chats qui se croient tout permis sur notre territoire !

Il y en a une qui ne va pas être facile à mater, cependant. Ah ! Qu’est-ce que je rigole quand je vois monsieur Patate se sauver devant elle ! Il n’a pas spécialement peur, il est plutôt surpris par l’affront de cette petite créature bondissante ! C’est Pirouette, un curieux chaton, têtu, monté sur piles, qui ne pense qu’à jouer et à provoquer les anciens. Moi aussi, je me laisse distraire par son cirque permanent, ses pitreries. Ça me rappelle ma tendre jeunesse, mon enfance, mon innocence…

Je ne suis pas souvent chez moi, en ce moment. Quand j’ai sommeil, je dors sous un buisson, à l’abri du vent, de la pluie ou du soleil quand il y en a. Parfois, la journée, quand ma maîtresse reste à la maison, je reste avec elle. Et si la couverture rouge, bien pliée sur le canapé lit, est libre, je m’y couche et je m’y endors, heureux comme un pape… Ah ! Que je l’aime, cette couverture rouge ! Si moelleuse, si confortable ! Je ne la partage pas, ça non. J’y suis, j’y reste, et jusqu’au soir.

Quand ma maîtresse veut gentiment me caresser, me flatter et que je lui attrape la main pour la griffer, elle me dit que je suis fou, que j’ai eu de la chance d’avoir été adopté par elle, que chez d’autres gens, on m’aurait mis à la porte depuis longtemps, envoyé à la SPA ou ramené à l’école du chat... Je suis irrécupérable, complètement taré, malfaisant. Ce sont ses propres mots lorsqu’elle est vraiment très en colère.

Je viens d’avoir onze ans, c’est encore le bel âge, je me sens jeune, en pleine possession de mes moyens, même si mon pelage noir se constelle, ici et là, de petites taches blanches. C’est la maturité, la force de l’âge. Jamais malade, toujours dehors, en toute saison. J’aime la pluie, la neige, le vent, les bourrasques.

Ce n’est pas comme la petite précieuse, qui n’aime pas se mouiller les pattes, qui pleure si par hasard une goutte lui tombe sur le coin du museau… Toujours fourrée à la maison, celle-là, à couiner devant la maîtresse pour qu’elle la prenne dans ses bras !

Moi, je ne me chauffe pas de ce bois-là. Certes, j’aime la chaleur du foyer après quelques nuits passées dehors à m’occuper de mes affaires, je mange alors copieusement avant de m’affaler dans un endroit où je vais être tranquille, comme la baignoire, j'adore ! Ma maîtresse, avec sa gentillesse habituelle, y dépose une serviette de toilette exprès pour moi. Je ronronne, je piétine de mes pattes avant, je me mets en rond et je finis par m’endormir, repus et satisfait.

J’aime ma maison, malgré tout, cette nouvelle maison où nous sommes depuis trois ans maintenant. La maîtresse a bien arrangé son nouveau lieu de vie, un peu plus grand que le précédent, en rez-de-chaussée également, avec une porte-fenêtre. C’est si pratique, pour entrer et sortir !

Il y a cette grande et large étagère au milieu de la pièce principale, qui sépare le coin chambre du coin bureau. En bas de l’étagère, elle a laissé un casier vide, très utile comme passage lorsqu’on est un chat, afin d’aller plus rapidement de la chambre vers le couloir, la salle de bains et la litière, la porte d’entrée… Elle pense à tout, ma chère maîtresse ! Elle aime tellement les chats !

 
Troisième partie : Léa

On me croyait mourante, me voici plus en forme que jamais ! Coriace, vivace, tenace, vorace, me dit ma maîtresse, qui me connaît si bien, qui s’occupe de moi à la perfection, me donnant tous les jours un cachet pour le cœur et pour les reins, m’emmenant chez le vétérinaire si je suis malade…

Comme cet été, quand je ne pouvais plus faire pipi, que ça me brûlait dans le ventre, que je n’avais plus ni faim ni soif. Heureusement, tout s’est arrangé. Ma maîtresse m’a forcée à avaler des cachets dont je ne voulais pas, que j’essayais par tous les moyens de recracher, mais dans le fond je le savais que c’était pour mon bien, pour ma santé. Ma maîtresse a tout fait pour me soigner.

J’ai fêté mes dix-huit ans au mois de juin. Ce n’est pas si courant, dix-huit ans, pour un chat ! Ma maîtresse m’a complimentée, elle est très fière de moi, elle me prend dans ses bras, elle m’appelle son « vieux chat ». Elle me parle doucement, tout près de mes oreilles. Elle sait que je suis sourde, complètement sourde, sourde comme un pot. Elle sait aussi que je la comprends quand elle me parle, quand elle me flatte par de jolis mots, exprès pour moi.

Je continue à manger avec appétit, parfois trop vite, et cela me fait vomir. C’est sûr, dès le matin au petit-déjeuner, ça n’enchante pas ma maîtresse de nettoyer. Je n’y peux rien, je suis âgée, j’ai les intestins dérangés. Au cours des années, j’ai perdu de la graisse, des muscles. J’aimerais bien être moins maigre, moins décharnée.

Quelquefois, la nourriture me dégoûte ; à d’autres moments je suis très affamée. Surtout quand ma maîtresse mange de ces choses à la si bonne odeur : du thon, du jambon, du steak… Elle en garde toujours un peu pour moi. Quand elle considère qu’elle m’en a donné assez, si j’insiste elle se fâche. Si j’insiste encore, elle me prend sous un bras, ouvre la porte fenêtre et me dépose délicatement sur la terrasse, sans un mot, puis retourne à son repas. J’ai beau gratter au carreau, rien n’y fait, je suis condamnée à rester dehors, comme une pauvre malheureuse. Pourquoi n’ai-je pas droit à ces bonnes choses plus souvent ?

D’accord, j’ai mes croquettes, « les croquettes de Léa » que ma jeune colocataire noire et blanche s’obstine à vouloir chiper sans cesse. Elle monte jusqu’à l’endroit qui m’est réservé, sur la machine à laver le linge, et avale ouvertement ma nourriture. Cela amuse plutôt ma maîtresse, qui prend la petite coupable dans ses bras, la pose par terre près de son plateau et lui verse une poignée de « mes » croquettes dans sa gamelle. Pauvre chérie !

Enfin j’en ai vu d’autres, et comparé à l’affreux Tempo qui éprouve un malin plaisir à me martyriser, Kiwi, avec ses jolies pattes blanches, son cou et ses moustaches assorties, est de bonne compagnie. Mais je n’y peux rien, c’est plus fort que moi, quand l’un ou l’autre m’exaspère, à venir me flairer de trop près, je grogne, je souffle, je crache et je menace. Cela suffit à les faire reculer, à se tenir tranquille, à me laisser tranquille.

Quand je suis vraiment contrariée, je m’énerve au point de tousser, de m’étrangler ; je sais, c’est moche. Quand ma maîtresse me voit dans cet état, elle me dit en riant : « Ne sois pas ridicule, Léa, tu te fais du mal pour rien ! » Je suis vieille, voilà tout, et je n’ai plus autant de patience qu’avant, dans mes jeunes années.

J’ai vécu seule, longtemps, avec ma maîtresse pour moi, exclusivement. Il y avait bien quelques invités, de temps en temps, pour les vacances : Igor, le chat élégant tout blanc, Speedy, la tigrée grise. Ils sont morts maintenant, paix à leur âme… Plus tard, Bianco s’est installé à la maison : une créature magnifique, blanc aux yeux vairons, un jaune, un bleu. Charmant, vraiment. Il a disparu du jour au lendemain. Ma maîtresse en a été fort triste, moi aussi, je l’aimais bien. Puis l’horrible chaton Tempo est arrivé et celui-là, rien à faire pour s’en débarrasser. Sale bête !

J’ai une belle vie, une longue et belle vie, bien remplie. Je ne sors plus beaucoup, j’apprécie l’intérieur de ma nouvelle maison, un peu plus spacieuse que la précédente, avec tous ces endroits que ma maîtresse met à ma disposition pour que je pique un gros roupillon. Ce que je préfère, c’est quand elle s’installe confortablement sur le canapé après avoir préparé un film à regarder sur l’écran de la télé ou de l’ordinateur.

Elle déplie la couverture rouge, se cale contre les oreillers, manie les télécommandes et démarre la projection… Je viens alors la rejoindre, je m’installe moi aussi, tout près d’elle. Ah ! Que je l’aime cette couverture rouge ! Si moelleuse, si confortable ! Je m’endors contre ma maîtresse en ronronnant. Elle s’endort parfois, aussi. C’est malin ! Nous voilà bien, toutes les deux, ronflant sur le canapé, devant un film qui défile sans spectatrices…

Il y a cette grande et large étagère au milieu de la pièce principale, qui sépare le coin chambre du coin bureau. En bas de l’étagère, elle a laissé un casier vide, très utile comme passage lorsqu’on est un chat, afin d’aller plus rapidement de la chambre vers le couloir, la salle de bains et la litière, la porte d’entrée… Elle pense à tout, ma chère maîtresse ! Elle aime tellement les chats !

 
Quatrième partie : Pirouette, décembre 2013

Oh là là ! Quelle aventure ! Depuis que la dame blonde m’ouvre sa porte et me donne à manger, qu’elle ne me chasse plus, qu’elle s’occupe de moi, qu’elle joue avec moi, je me sens tellement mieux, bien plus heureuse !

Je peux même dormir chez elle, de temps en temps, le jour ou la nuit, sur son canapé lit. Il y a dessus une couverture rouge, moelleuse et confortable, si agréable pour s’abandonner au sommeil…

Moi, Pirouette, arrivée tout bébé chez mon maître à la fin du printemps, je préfère et de loin la maison de la dame blonde ! Alors dès que je peux, je viens chez elle. Surtout que mon maître me laisse souvent et longtemps dehors ; il rentre tard, au milieu de la nuit, au petit matin… Je ne sais pas où aller, moi, quand il pleut, quand il fait froid…

Maintenant, quand je me poste à la fenêtre de la dame blonde, elle n’hésite plus à m’ouvrir, à me faire partager son intérieur, son quotidien avec ses trois autres chats. D’ailleurs, ils sont plutôt gentils avec moi, ils me laissent prendre mes aises sur la couverture rouge. Je verrai bien ce que l’avenir me réservera, la vie est devant moi !

dimanche 29 décembre 2013

Journal de bord : épilogue


Jeudi 29 août 2013
C’est la pré-rentrée : retour dans mon école de rattachement pour des réunions de travail, la prise de contact avec le nouveau directeur et les collègues nouvellement nommés. C’est encore l’été, les mines sont bronzées, détendues…

Tout le monde est présent, pas de remplacement pour moi dans l’immédiat, du moins dans cette école. En attendant un éventuel coup de fil de l’Inspection, je laisse mes collègues s’installer dans leur classe et je donne un coup de main au directeur.

Lundi 2 septembre 2013
Demain, c’est la rentrée des élèves. Aujourd’hui, Frédérique, sur le double niveau CM1/CM2, m’annonce qu’elle va devoir s’absenter à partir du jeudi 4 pour raisons médicales, une semaine voire plus. Après mise au courant de l’Inspection, j’apparais toute désignée pour effectuer le remplacement.

Je me renseigne auprès de Frédérique sur la façon dont elle compte travailler en double niveau, sur ce qu’elle fera mardi, sur ce qu’elle avait envisagé de commencer jeudi… Je connais un peu ses méthodes de travail pour l’avoir déjà remplacée en 2012, de la rentrée des vacances de Toussaint jusqu’à celles de Noël.

J’avais passé de bons moments dans sa classe de CM1, plutôt travailleuse et d’un bon niveau, située dans l’école d’un quartier pavillonnaire. Cela avait été, je dois l’avouer, nettement plus enrichissant qu’avec « mon » CM1 de ZEP, de mars à juillet 2013.

Mardi 3 septembre 2013
Dès huit heures vingt, les élèves arrivent tous pimpants ; ce début de matinée est ensoleillé et met du baume au cœur. Je suis dans la cour pour les accueillir, beaucoup de parents sont là aussi, notamment pour les petits qui entrent en CP. Tout le monde sourit, tout le monde paraît content, si seulement ça pouvait durer !

Je reste après seize heures trente pour « faire la liaison » avec Frédérique, je prends connaissance de son emploi du temps hebdomadaire (ici, durant cette année scolaire, nous allons continuer à travailler sur quatre jours), de ce qu’elle a fait aujourd’hui, de ce qu’il y aura à poursuivre les jours à venir… Elle a fait passer des évaluations sur les deux niveaux de classe, elle me promet qu’elle les corrigera dès que possible.

Le livre de français englobe les niveaux CM1 et CM2 (cela va bien simplifier les choses), il y a un manuel de maths pour chaque cours mais c’est le même éditeur et la même collection. Il faudra dédoubler en histoire, mais pas forcément en sciences, ni en géographie. Je vais faire au mieux pour que ça tourne.

Jeudi 4 septembre 2013
Mon mercredi matin a été consacré à la préparation de la classe, j’arrive « armée » et « outillée ». Les huit CM1 et les quatorze CM2 sont surpris de me voir, ils n’ont pas été mis au courant, cela leur fait bizarre de changer de maîtresse du jour au lendemain, qui plus est dès leur deuxième jour de classe. Parmi les CM2, il y a quelques élèves que j’ai eus l’an dernier dans le « fameux » CM1 : les très sérieuses Elif et Beyza, les un peu plus agitées Schaïneze et Macouta, la gentille Assa, ainsi que Souhaïb et Yunus-Emre. Je connais un peu les CM1 et les autres CM2, pour avoir effectué des remplacements dans différentes classes de l’école, les années précédentes.

Dans la matinée, le directeur arrive avec une nouvelle élève nommée Islam, dont je dois évaluer les compétences pour savoir si elle est capable de suivre en CM1 ou en CM2. L’année dernière, elle se trouvait dans une classe pour enfants non francophones (elle arrivait d’Espagne) et réintègre donc un cours « banal » après avoir appris le français. Les effectifs montent à vingt-trois, je trouve que c’est énorme pour un double niveau et qui plus est, en ZEP.

Jeudi 19 septembre 2013
Le congé de ma collègue a été prolongé jusqu’au mardi 24 septembre inclus. Il se peut qu’il se prolonge encore après, donc je m’investis « comme si c’était ma classe ».

J’ai à peu près trouvé un rythme de croisière avec, dès le matin, les mêmes activités :
-La date historique (un événement marquant au cours des siècles, comme la naissance de François 1er le 12 septembre 1494 ou la mort de Maria Callas le 16 septembre 1977…)

-La dictée du jour (quelques phrases simples corrigées tout de suite après au tableau, en justifiant l’orthographe, l’orthographe grammaticale, les règles d’accord…)

-Suivent une leçon de français, des exercices d’application et, après la récréation, des maths avec calcul mental pour tous, puis cours en double niveau dans la mesure du possible.

En début d’après-midi, j’ai repris le principe de la lecture offerte, qui est toujours un moment privilégié en termes de calme et d’écoute.

Après, on fait des sciences, de la géographie, de l’histoire en double niveau puisque les CM1 attaquent le Moyen Âge alors que les CM2 abordent le XVIIe siècle et la monarchie absolue.

Une fois par semaine on va en salle info, au gymnase, on fait un peu d’anglais (grâce aux Beatles).

La deuxième partie de l’après-midi est toujours délicate, les élèves reviennent énervés de la récréation et il est difficile de les remettre au travail. Le vendredi après-midi, après avoir donné les devoirs pour le lundi, je laisse les élèves s’installer comme ils veulent pour jouer ou dessiner.

J’ai emprunté des jeux de société à la nouvelle collègue de CM2, qui occupe la classe que j’avais l’an dernier en CM1. Je mets des coloriages (magiques, mandalas) à disposition, tout le monde est occupé, mais il faut surveiller, rester vigilant. On n’est jamais à l’abri d’un débordement, les violences sont quotidiennes quoi que l’on fasse.

Dans l’ensemble, ça se passe bien. C’est comme une soupape de sécurité, ces jeux du vendredi. Je souffle, eux aussi ; je les sens relativement contents d’être en classe. Il me semble important qu’il y ait aussi, de temps en temps, sur le temps scolaire, ce côté plaisir.

Mardi 24 septembre 2013
C’est peut-être mon dernier jour avec les CM1/CM2, mais je ne le sais pas encore et Frédérique non plus, cela dépendra du résultat de ses analyses, qu’elle aura seulement en fin d’après-midi.

Ce matin, la date historique est au sujet de Georges Brassens (1921-1981) et de son triomphe devant le public de l’Olympia, le 24 septembre 1954.

Suivent la correction de la dictée bilan du lundi, une nouvelle dictée d’entraînement, un jogging d’écriture dont le thème est : « Je raconte mon pire cauchemar. »

Je passe du temps avec certains élèves pour organiser leur classeur en fonction des matières étudiées. Il faut placer correctement les intercalaires, écrire dessus le nom de la matière concernée… J’ai horreur des classeurs, je hais les classeurs, je préfère les grands cahiers dans lesquels on colle les feuilles, ou les porte-vues qui permettent de ranger les documents dans l’ordre, sans risque de tout faire exploser si ça tombe par terre…

En géométrie, nous reproduisons la figure de l’escargot en utilisant la règle et le compas. Je trouve important que les élèves soient à l’aise dans le maniement des instruments avant d’attaquer des notions plus théoriques.

Après la lecture offerte du début d’après-midi (« Une bête dans la nuit » dans « Les contes du stylo magique » de Philippe Barbeau), nous récitons la poésie donnée par Frédérique le premier jour de classe : « La guenon, le singe et la noix » de Jean-Pierre Claris de Florian.

C’est le jour de la photo de classe dans la cour de l’école, puis de la photo des enfants et des enseignants de l’école tout entière. Je barre « Instruction civique » et « Nombres et calculs » sur mon programme de l’après-midi. Nous copions les devoirs pour jeudi avant d’aller en salle informatique faire une recherche sur les Beatles. Un demi-groupe est sur les ordis, l’autre fait un coloriage mathématique (la table de multiplication par 4) puis on change.

Frédérique me téléphone sur mon portable vers dix-sept heures pour m’annoncer qu’elle reprend jeudi 26 septembre. Je suis encore dans la classe, à corriger les cahiers du jour. Comme à chaque fin de remplacement, quelque part je me sens « soulagée » (ça n’a pas toujours été simple), et en même temps j’ai un pincement au cœur à l’idée de quitter les élèves (même si certains sont particulièrement gratinés).

Frédérique vient me retrouver pour « faire la liaison », nous travaillons jusque dix-neuf heures. J’emporte à la maison des exercices sur feuille à corriger pendant mon mercredi, histoire de tout bien « boucler », dans les règles de l’art.

Lundi 4 novembre 2013
En ce jour de rentrée des vacances de Toussaint, il y a deux collègues absentes dans mon école de rattachement. On m’attribue le CM2 (l’autre classe est un CM1), me revoilà dans la salle que j’ai occupée l’année scolaire précédente en CM1, cela me fait tout drôle.

Je retrouve l’autre partie de mes anciens élèves de CM1, certain(e)s avec grand plaisir (Safeer, Osman, Simbara, Moussa, Mohamed-Amine, Koumba, Maïssa), les autres avec un peu plus d’appréhension (Mody, Mehdi et Mamadou, Naïma et Rebecca). Sibel et Sila sont absentes ce jour-là, elles le seront aussi le lendemain. Je me demande bien pourquoi, après deux semaines de vacances !

Je décide de but en blanc de me lancer dans la conjugaison. Sur le cahier de leçons, il n’y a qu’un texte photocopié sur « le verbe et son infinitif » mais en feuilletant le manuel de français avec les élèves, ils me disent qu’ils ont déjà étudié et fait des exercices sur le présent de l’indicatif des verbes du 1er et du 2e groupe, ce qui semble pertinent puisqu’ils ont déjà eu huit semaines de classe depuis la rentrée.

Je redémarre donc sur le présent de l’indicatif des auxiliaires être et avoir, et de quelques verbes du 3e groupe. J’apprendrai plus tard qu’en fait ils n’avaient pas commencé du tout la révision du présent, ils m’ont dit ça au hasard…

Tant pis, ce n’est pas dramatique. Dans l’ensemble, les élèves de cette classe sont studieux, calmes et appliqués ; je constate qu’ils ont mûri, grandi, depuis l’année passée. Il y aura quand même dès le matin une altercation (plus trivialement une bagarre) entre Rebecca et son voisin de table Youssef. La collègue Frédérique occupant la classe voisine intervient et m’aide à les séparer. Je change Rebecca de place et je punis les deux fauteurs de trouble à la prochaine récré.

Mardi  5 novembre 2013
Mon remplacement se poursuit sur une deuxième journée, le temps que la collègue récupère d’une gastro plutôt coriace. Comme la plupart des élèves me connaissent, leur faire la classe me semble relativement facile, en tous les cas plus facile que dans le CM1/CM2 du mois de septembre. En histoire, nous étudions une version simplifiée de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, ce qui débouche sur des débats intéressants.

Comme nous sommes en novembre, nous lisons et répondons aux questions (lecture/compréhension) d’un texte sur le déclenchement de la première guerre mondiale, les tranchées, les Poilus, les batailles meurtrières, l’armistice du 11 novembre 1918…

Les élèves n’auront pas perdu leur temps, moi non plus ; je sors de ces deux jours relativement satisfaite et toujours motivée par l’envie d’enseigner.

 

vendredi 27 décembre 2013

1/3 Les concerts pour LO : Prix Georges Moustaki



Centre Malesherbes de l’Université Paris-Sorbonne
Grand Amphithéâtre (Paris 17e)
22 février 2013

C’est la troisième édition de cette manifestation organisée par l’association "Poésie et Chanson Sorbonne", à l’initiative de Matthias Vincenot et Thierry Cadet.

Le blog de Matthias Vincenot :

Le prix Georges Moustaki (dont le logo a été créé par le grand artiste lui-même) récompense l’album indépendant et/ou autoproduit de l’année, sans distinction de style, si ce n’est l’impératif de chanter des textes en français.

Le Prix Georges Moustaki sur le Web :

Cette soirée musicale est proposée dans le cadre plus large du programme du Service Culturel de l’Université Paris-Sorbonne.

Toutes les infos sont ici :

Pour recevoir l’agenda culturel :

Deux prix seront remis au cours de la soirée :

-Le Prix du Jury, avec pour président d’honneur Georges Moustaki, pour président du jury 2013 Alexis HK, et Barcella pour parrain de la promotion.

-Le Prix du Public, venu nombreux, à qui il sera demandé après la prestation des candidats d’entourer un seul nom sur le bulletin de vote qui lui a été remis à l’entrée de l’amphi.

Il y a sept finalistes, sélectionnés à l’issue d’une demi-finale composée de vingt-deux candidats. Pour la petite histoire, la pré-sélection en comportait cent cinquante ! Dure tâche pour le jury que de départager tous ces artistes, qui ont tous, au moins, un album à leur actif.

La liste du jury 2013, tous professionnels de la musique, est disponible en cliquant sur ce lien : http://www.prixgeorgesmoustaki.com/le-jury-2013

Citons, entre autres, la présence d’Isabelle Dhordain (France Inter), Stéphanie Berrebi (FrancoFans), Serge Beyer (rédacteur en chef et fondateur de Longueur d’Ondes)…

Ce soir, les candidats chantent chacun deux morceaux. Suit une petite interview pendant le changement de plateau.

Les artistes se produisent selon l’ordre alphabétique de leur nom : Aliose, Askehoug, La Jeanne, Luciole, Céline Ollivier, Scotch & Sofa, 3 Minutes sur Mer. Leurs albums respectifs seront en vente à l’issue des concerts, après la proclamation des résultats.

-Aliose, duo suisse (Alizée au chant, Xavier au chant et à la guitare) originaire de Nyon, ouvre le bal avec un premier titre un peu poussif puis un "Je n’suis pas folle" percussif et percutant. "Le vent a tourné" est leur deuxième album.

-Askehoug joue en trio, dans une ambiance jazzy et piano bar. Mathieu, chanteur à la voix grave, incarne un dandy moustachu à la façon de Jean Rochefort. "Je te tuerai un jeudi", chanson du deuxième album qui porte aussi ce titre, fait des émules dans la salle.

-La Jeanne aime les musiques latines et cela s’entend ; elle est dotée d’une belle et "vraie" voix et mène la danse, invitant le public à frapper dans ses mains. Elle concourt pour un mini album de quatre titres que l’on peut écouter sur son MySpace.

-Luciole est une bonne femme toute ronde, petite Piaf rennaise aux cheveux longs et aux jeux de scène convaincants et expressifs. Ses chansons sont simples, mais finement écrites. Après un premier album, elle a sorti récemment un EP : "Et en attendant…"

-Céline Ollivier arrive accompagnée par Mell à la guitare électrique. Sur scène, les orchestrations sont plus folk, plus country que sur son premier album studio "La femme à l’éventail". Cette auteur compositrice interprète a de la classe, et du "chien".

-Le concours continue avec Scotch & Sofa, bien connu pour son tube avec Ours : "Ça se". De petits problèmes techniques empêchent d’apprécier le beat box de Romain, qui est accompagnée au chant par la blonde et diaphane Chloé. "Par petits bouts" est leur premier album.

-3 Minutes sur Mer clôt la session et retient l’attention de l’auditoire grâce à la voix de Guilhem, jardinier contrarié inspiré, mi-Jacques Brel mi-Gaëtan Roussel, et à la guitare nerveuse de son comparse Samuel. L’album "Des espoirs de singe" a été enregistré en live.

Après l’entracte et en attendant la proclamation des résultats, le rémois Barcella, parrain du Prix Georges Moustaki 2013, offre un mini-concert sympathique et plein d’humour, notamment quand il narre les amours d’un stylo et d’une feuille de papier ou qu’il se souvient de ses cahiers de vacances. Son premier album "La boîte à musiques" était autoproduit, le second "Charabia" sort chez Sony, mais il assume et estime qu’avec un projet qui tient la route, on peut s’imposer face à une grosse maison de disques.

Voici enfin la proclamation des résultats :

Le Prix du Jury est attribué à Askehoug, le Prix du Public à 3 Minutes sur Mer. Tout le monde a l’air satisfait.

Le mot de la fin sera pour Alexis HK, qui parle d’obstination et de persévérance, nécessaires pour mener à bien une carrière d’artiste dans cette période de crise, où rien n’est facile.

Aliose
Aliose
Aliose
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Final

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